si c'est plus facil?
Pour protéger les animaux, la loi cherche la petite bête
MESURES OU DÉMESURE? | 01h40 La nouvelle ordonnance fédérale sur la protection des animaux va-t-elle trop loin en imposant un permis pour chien ou en exigeant que les perruches soient vendues par paires? Même la SVPA doute de son applicabilité.
CORBIS | EN COUPLE SINON RIEN: Selon les nouvelles prescriptions fédérales, les animaux sociaux, tels que les cochons d'Inde ou les perruches, ne pourront plus être détenus individuellement. «Ridicule!» réagit une animalière.
Agrandir la taille du texte Réduire la taille du texte Imprimer l'article Envoyer par email Réagir sur l'article Recommander JOËLLE FABRE | 25 Avril 2008 | 01h40
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Permis à toutou, permis partout? Vous n'avez fait qu'un enfant à la fois? Personne ne peut vous obliger à procréer des jumeaux. En revanche, plus question dès le 1er septembre prochain d'acheter une seule perruche ondulée ou d'adopter un cochon d'Inde unique. La nouvelle ordonnance sur la protection des animaux, adoptée avant-hier par le Conseil fédéral, ne tolère pas l'ennui chez les bêtes (24 heures d'hier).
Parmi un interminable train de mesures, la nouvelle législation impose une formation à tous les futurs propriétaires de chiens. Chihuahua ou dogue allemand, peu importe. Tout le monde sera logé à la même enseigne: la formation débouchera sur un examen théorique (valable à vie) assorti d'un test pratique à repasser à chaque nouvel animal. Comment s'organisera cette formation? A quel prix? Qui seront les formateurs agréés? Et pendant ce temps, qui ira s'assurer que la cage du hamster doré de Madame Dupont a la taille requise? «Un service spécialisé en protection des animaux sera mis sur pied dans chaque canton», répond l'Office vétérinaire fédéral.
Dans le canton de Vaud, le diktat fédéral est accueilli avec circonspection. Hier, Jacques-Henri Penseyres, vétérinaire cantonal, n'a pas voulu se prononcer sur ce texte de 160 pages qu'il aura à appliquer et dont il était en train de prendre connaissance: «Je n'ai pas encore pu mesurer toutes les conséquences de la nouvelle législation, cela va poser quantité de questions. Mais il est d'ores et déjà clair, par rapport à tout ce qui nous est demandé, que nous n'aurons pas assez de personnel.»
«Il faudra une armée de fonctionnaires!»
Samuel Debrot, président de la Société vaudoise de protection des animaux (SVPA), abonde dans le sens du vétérinaire cantonal: «Il faudrait une armée de fonctionnaires pour faire appliquer tout ça. Cela représente un immense volume de travail supplémentaire et par conséquent des dépenses. Sur le papier, c'est très bien. Je ne peux qu'approuver ce tour de vis, mais j'ai des craintes. Ces dispositions vont trop dans le détail. La loi actuelle est déjà insuffisamment respectée, faute de personnel.» L'Etat s'est déjà déchargé d'un certain nombre de tâches sur la SVPA, comme la fourrière, la séquestration des animaux mordeurs ou les cours d'éducation canine, indique Samuel Debrot.
Pauvre cobaye solitaire
Aux yeux de la SVPA, le permis pour chien est une bonne mesure, mais trop compliquée à mettre en oeuvre: «Sur les 40 000 à 50 000 chiens du canton, cela implique d'innombrables contrôles et l'organisation de cours spécifiques. Il faudra plusieurs années pour mettre cela sur pied. De plus, nous sommes bien placés pour savoir que les chiens changent beaucoup de propriétaire. Comment on s'arrangera avec ça? A mon avis, plus on légifère, moins on applique. Le danger, c'est que la loi ne soit plus prise au sérieux.»
En effet. Tandis que des éleveurs de yorkshire se tordent les côtes, du côté des magasins zoologiques, on rit jaune canari. «Cette loi est ri-di-cule!» martèle entre autres Karin Adou, vingt ans d'animalerie au compteur: «Bien entendu que certains animaux sont plus heureux à deux, mais pourquoi en faire une obligation? Des perruches tueuses, ça existe aussi et les cobayes solitaires ne sont pas forcément malheureux. Une personne âgée qui s'en occupe beaucoup peut être un meilleur compagnon qu'un congénère au sale caractère. L'important c'est le conseil, la discussion avec le client. C'est là-dessus qu'on aurait dû légiférer. Faire en sorte que la vendeuse du rayon valise d'un grand magasin ne se retrouve pas à vendre des animaux comme n'importe quel produit.»